La fondation de San Sebastián
Les fouilles archéologiques du couvent de Santa Teresa constatent la présence romaine, puis, après plusieurs siècles sans aucun vestige, elles mettent à jour une nécropole près d'une église datant au moins du 10e siècle. Ces découvertes sont conformes au contexte de repeuplement monastique à caractère agricole de cette époque : les routes de transhumance dans les vallées basses des rivières Urumea, Oria et Urola sont attestées dans un document dès 1025 (le premier document citant « Ipuscoa »). Dans tous les cas, dès la fin du 11e siècle, le monastère de San Sebastián (où se trouve aujourd’hui le palais de Miramar) et ses environs jouent un rôle important dans l’histoire guipuzcoane.
San Sebastián fut fondée en tant que villa par le roi navarrais Sancho VI le Sage, vers la fin du 12e siècle, probablement en 1180, dans le cadre d’une stratégie plus globale menée par la monarchie navarraise. Bien évidemment, la concession de la catégorie juridico-politique de For ou Fuero ne suppose pas la fondation ex nihilo de la cité. D’ailleurs, déjà en 1178, des documents concernent les églises de San Vicente et de Santa María. L’existence de ces deux églises pourrait peut-être traduire l'origine diverse des premiers habitants de Donostia : autochtones et gascons. Dans ce sens, la présence de communautés gasconnes originaires de Baiona (Bayonne) aux embouchures du Bidasoa et de l’Urumea ainsi que dans la baie de Pasaia est tout à fait connue. Au cours du Moyen-Âge inférieur, celles-ci contrôlèrent de nombreux lieux de pouvoir, comme le conseil de Donostia. De plus, elles ont laissé des traces dans l’onomastique et la toponymie (Embeltran, Narrica, Morlaans, Aiete, Monpas, etc.). Des documents écrits dans leur langue ont même été trouvés.
Par la fondation de la ville, le monarque navarrais a cherché à fixer les populations présentes et à promouvoir l’installation d’éléments autochtones dédiés à des activités commerciales et maritimes. L'obligation d'autorisation de la part des habitants pour l'installation des « navarrais » dans la nouvelle cité aurait répondu, plus qu’à une référence ethnique ou d’origine, à une différenciation des activités entre les paysans (navarrais) et les villanos (francs). Entre autres avantages octroyés, signalons l’exemption de service militaire et l’exonération d’impôts pour les activités marchandes et la consommation. Les habitants de la nouvelle cité obtiennent le droit à être jugés dans leur ville, selon leur jurisprudence ou selon le Fuero de Estella (for duquel dérive celui de Donostia).
La juridiction territoriale de la cité donostiarra était grande, depuis l’embouchure du Bidasoa jusqu’à celle de l’Oria et depuis la côte jusqu’à Arano, en Navarre. Les fondations ultérieures des autres cités (les villas de Hondarribia, Errenteria, Hernani, Orio, etc.) à l’intérieur de sa juridiction territoriale donnèrent lieu à de nombreux litiges, notamment pour le contrôle de la baie de Pasajes. Car en effet, même si le site « naturel » de la ville était la baie de la Concha au-dessous de la colline d’Urgull, à côté des murailles, et que de l’autre côté de l’isthme, à l’embouchure de l’Urumea, étaient situés le chantier naval et la jetée de Santa Catalina, à mesure que les embarcations grossissaient, la partie de San Pedro et de la Herrera allait devenir le principal port de Donostia. Donostia exportait du fer guipuzcoan et de la laine de Navarre, et importait des tissus des Flandres. Le royaume de Navarre continua de favoriser le commerce à travers San Sebastián, y compris après l'intégration de Gipuzkoa au sein de la Castille La cité, avec d’autres villas guipuzcoanes, créa son propre système de promotion commerciale : accord commercial avec Bayonne et l’Angleterre, « Confrérie des Marismas » liant plusieurs villes à Vitoria, etc.
Tout comme Hondarribia (les deux villes étaient des places fortes), Donostia était dotée d’un château et de murailles qui furent agrandies jusqu’à former une citadelle, détruite en 1864 pour permettre le premier élargissement urbain. Des vestiges de ces fortifications sont visibles dans le parking souterrain du Boulevard. Pour sa part, le château de la Mota, sur la colline d’Urgull, est cité pour la première fois en 1199, alors que la ville était déjà fondée (même si certains ajoutent qu’il a été bâti sur une ancienne forteresse). Le fort que l’on voit aujourd’hui daterait d’après le 15e siècle (probablement reconstruit en 1525). Les vestiges de murailles, batteries, etc. qui jonchent le mont Urgull sont plus récents.